Afin de pratiquer les textes avec sagesse il est bien utile
d’écouter les commentaires de nos grands frères. Voici les quatorze
entrainements à la pleine conscience de l'ordre de l'inter être ainsi
que les commentaires de Thai sur chacun d'eux.
.
Quatorzième Entraînements : Amour véritable
Pour les membres laïcs :
Conscients
que le désir sexuel n’est pas l’amour et que les relations sexuelles
motivées par l’avidité ne peuvent pas dissiper les sentiments de
solitude mais qu’elles engendrent encore plus de souffrances, de
frustration et de solitude, nous sommes déterminés à ne pas avoir de
rapports sexuels sans compréhension et amour mutuels, sans engagement
profond, durable et connu de nos proches. Sachant que le corps et
l’esprit sont un, nous nous engageons à apprendre les moyens appropriés
pour prendre soin de notre énergie sexuelle et à cultiver la bonté
aimante, la compassion, la joie et la non-discrimination pour notre
propre bonheur et pour celui des autres. Nous devons être conscients de
la souffrance qui pourrait être provoquée dans le futur par nos
relations sexuelles. Nous savons que pour préserver notre bonheur et
celui des autres, nous devons respecter nos engagements ainsi que les
droits et engagements d’autrui. Nous ferons tout notre possible pour
protéger les enfants des abus sexuels et pour empêcher les couples et
les familles de se briser à cause de comportements sexuels
irresponsables. Nous traiterons notre corps avec compassion et respect.
Nous sommes déterminés à regarder profondément les Quatre Aliments et à
apprendre les moyens de préserver et de canaliser nos énergies vitales
(sexe, respiration et esprit) pour réaliser notre idéal de bodhisattva.
Avant de contribuer à l’apparition de nouvelles vies, nous serons
pleinement conscients de notre responsabilité et nous méditerons
régulièrement sur leur futur environnement.
Pour les membres monastiques :
Conscients
que l’aspiration profonde d’un moine ou d’une moniale peut seulement se
réaliser lorsqu’il ou elle abandonne complètement les liens charnels,
nous nous engageons à pratiquer la chasteté et à aider les autres à se
protéger. Nous savons que les sentiments de solitude et de souffrance ne
peuvent se dissiper par un rapport sexuel mais plutôt par la pratique
de la bonté aimante, de la compassion, de la joie et de la
non-discrimination. Nous sommes conscients qu’un rapport sexuel
détruirait notre vie monastique, nous empêcherait de réaliser notre
idéal de service des êtres vivants et nuirait à la vie d’autrui. Nous
apprendrons les moyens appropriés de prendre soin de notre énergie
sexuelle. Nous sommes déterminés à ne pas opprimer notre corps, à ne pas
le maltraiter ou le considérer comme un instrument, mais à nous occuper
de lui avec compassion et respect. Nous sommes déterminés à regarder
profondément les Quatre Aliments pour préserver et canaliser nos
énergies vitales (sexe, respiration, esprit) afin de réaliser notre
idéal de bodhisattva.
Tant de personnes, enfants,
couples et familles ont été blessés par une mauvaise conduite sexuelle.
Mettre cet entraînement en pratique nous protège, nous et les autres, de
telles blessures. Notre stabilité, comme celle de nos familles et de la
société en dépend. Le but du Quatorzième Entraînement à la Pleine
Conscience est de nous guérir et de guérir notre société. Lorsque nous
sommes résolus à le pratiquer, naît en nous l'énergie qui nous
transforme en bodhisattva. C'est ce qui s’appelle vivre en Pleine
Conscience. Dans le Bouddhisme, on parle d'unité du corps et de
l'esprit. Tout ce qui arrive au corps arrive aussi à l'esprit. Un corps
sain est un esprit sain. Violer le corps, c'est violer l'esprit. L'union
de deux corps n'est juste que s'il existe compréhension et communion au
niveau de l'esprit. L'union sexuelle devrait être un rituel accompli en
pleine conscience, avec grand respect, amour et attention. C'est une
union profonde, belle et totale. Dans ma tradition, mari et femme sont
censés se respecter comme des invités; lorsqu'ils le font, leur amour et
leur bonheur durent très longtemps. Le respect est l'une des
composantes les plus importantes des relations sexuelles. L'amour
véritable inclut aussi un sens des responsabilités et l'acceptation de
l'autre tel(le) qu'il (elle) est, avec ses qualités comme avec ses
défauts. L'expression "engagement à long terme" nous aide à comprendre
le sens du mot "amour". Un engagement à long terme entre deux personnes
n'est qu'un début. Pour qu'un arbre devienne solide, il faut que ses
racines s'ancrent profondément dans le sol. Si un arbre n'a qu'une
racine, il peut facilement être emporté par le vent. La vie d'un couple
doit également être soutenue par plusieurs autres facteurs ‐ par les
familles, les amis, les idéaux, la pratique et la Sangha.
"Responsabilité", c'est le mot clé. Le sens de la responsabilité
s'acquiert par la Pleine Conscience. Si, dans une communauté de
pratique, il n'y a pas d'inconduite sexuelle, et si la communauté
respecte bien cet entraînement, il y règnera paix et stabilité. On se
respecte, on se soutient et on se protège mutuellement en tant que
frères et soeurs dans le Dharma. Sinon, on est irresponsable et cela
crée des problèmes. Nous nous abstenons de rapports sexuels car nous
sommes responsables du bien‐être de beaucoup de personnes. Notre
irresponsabilité peut tout détruire. Grâce à cet entraînement, notre
Sangha sera une belle Sangha.
Il nous faut aussi aborder les
problèmes touchant à cet entraînement: la solitude, la publicité et
l'industrie du sexe. Le sentiment de solitude est un sentiment
universel. S'il n'y a pas de communication entre nous et les autres,
même en famille, cela peut nous conduire à vouloir nous réfugier dans
des relations sexuelles. Croire qu'une union charnelle nous protège de
la solitude est un leurre. Nous nous sentons, en réalité, bien plus
seuls après. Lorsqu’il n'y a pas assez de communication au niveau du
coeur et de l'esprit, la sexualité ne fait qu'élargir le gouffre entre
nous et nous détruit. Nos relations deviennent orageuses et nous font
beaucoup souffrir. En pratiquant le Quatorzième Entraînement, nous
devons nous questionner sur la nature de notre amour afin de ne pas
s'illusionner sur nos sentiments. Nous pensons parfois que nous aimons
l'autre personne, mais ce n'est peut‐être que pour assouvir des désirs
égoïstes. Peut‐être n'avons‐nous pas assez compris les besoins de
l'autre qui ne devrait pas être considéré(e) comme un objet de désir ou
un objet commercial. Notre société utilise perversement le sexe pour
vendre toutes sortes de produits. Il y a aussi l'industrie du sexe. Tout
cela est un obstacle à notre pratique. Nous sommes tous des êtres
humains capables de devenir de futurs bouddhas. C'est ainsi que nous
devrions nous considérer et nous ne devrions pas l'oublier. Après
plusieurs années de pratique ascétique dans la forêt, Sakyamuni Bouddha
réalisa que maltraiter son corps était une erreur et abandonna cette
pratique. Il vit que l’abandon aux plaisirs sensuels tout comme le
mauvais traitement du corps étaient des extrêmes à éviter, tous deux
entraînant la dégénérescence de l’esprit et du corps. C’est pourquoi il
adopta la Voie du Milieu, intermédiaire entre les deux. En Asie, il
existe trois sortes d'énergies: l'énergie sexuelle, le souffle vital et
le mental. L’énergie sexuelle est celle que nous dépensons lors des
rapports sexuels. Le souffle vital est l’énergie dissipée quand nous
parlons beaucoup et respirons peu. L’énergie mentale est celle que nous
utilisons lorsque nous nous faisons trop de soucis. Il nous faut
apprendre à établir l'équilibre entre ces trois énergies au risque
d'agir de façon irresponsable. D’après la médecine orientale, si ces
sources d’énergie sont gaspillées, le corps s’affaiblit et la maladie
apparaît. Il devient alors difficile de pratiquer la Voie. Dans le
Taoïsme et dans les arts martiaux, il existe de nombreuses méthodes pour
préserver ces trois sources d’énergie. Lorsque nous pratiquons la
respiration consciente, en comptant et en suivant notre respiration,
nous ne gaspillons pas l'énergie vitale respiratoire mais, au contraire,
nous la renforçons.
La concentration et la joie de la méditation n’épuisent pas l’esprit
mais le fortifient. L'énergie sexuelle peut être canalisée vers de
grandes créations artistiques ou vers la méditation. Nous devons être
conscients du futur dans lequel nous faisons naître nos enfants. Cette
prise de conscience nous motivera à agir et à vivre d’une façon plus
propice à créer un futur meilleur pour nous et pour nos enfants. La
solution n’est pas de cesser d’avoir des enfants, mais de créer un monde
vivable pour eux. Le futur du monde et de nos enfants dépend de notre
style de vie d'aujourd’hui. Si nous continuons à exploiter et à détruire
notre système écologique, si nous laissons la course aux armements se
poursuivre, si nous n’essayons pas de ralentir la croissance de la
population mondiale, alors la terre et l’humanité n’auront pas d’avenir.
Le style de vie de chacun
d’entre nous doit être une brique dans la construction d’un futur de
paix. Le Quatorzième Entraînement est vaste, et son observation est liée
à tous les autres entraînements de l'Ordre de l'Inter‐Être. Afin de le
comprendre profondément et de l’observer correctement, nous devons être
capables de voir sa relation avec notre méditation quotidienne, les
Quatre Nobles Vérités et l'enseignement bouddhiste sur la renaissance.
Les Quatorze Entraînements à la Pleine Conscience de la communauté de
l'Ordre de l'Inter‐Être sont le coeur du Bouddha. C'est la Pleine
Conscience dans notre vie réelle, et non de simples idées. Si nous les
pratiquons attentivement, nous nous apercevrons que l'un contient tous
les autres. Les étudier et les mettre en pratique peut nous aider à
comprendre la véritable nature de l'interdépendance. Nous ne pouvons pas
vivre par nous‐mêmes. Nous ne pouvons qu'inter‐être avec le monde et
les choses. Pratiquer ces entraînements, c'est prendre conscience de ce
qui se passe dans notre corps, notre esprit et le monde. Avec diligence,
nous pouvons vivre heureux, pleinement présents à chaque instant,
chercher intelligemment des solutions aux problèmes qui surgissent et
travailler pour la paix, à grande et à petite échelle.
Nous remercions le Centre de méditation de l'Estrie d’où nous provient ces
commentaires.