6 : Prendre soin de la colère

Publié le par Sangha de la pluie qui fleurit
6 : Prendre soin de la colère
Afin de pratiquer les textes avec sagesse il est bien utile d’écouter les commentaires de nos grands frères. Voici les quatorze entrainements à la pleine conscience de l'ordre de l'inter être ainsi que les commentaires de Thai sur chacun d'eux.

Sixième Entraînement : Prendre soin de la colère

Conscients que la colère bloque la communication et crée de la souffrance, nous nous engageons à prendre soin de l’énergie de la colère quand elle surgit, à reconnaître et à transformer ses semences qui sont profondément enfouies dans notre conscience. Quand la colère se manifeste, nous sommes déterminés à ne rien dire, à ne rien faire mais à pratiquer la respiration consciente ou la marche méditative pour la reconnaître, l’embrasser et la regarder profondément. Nous sommes conscients que les racines de la colère ne sont pas extérieures à nous-mêmes mais se trouvent dans nos perceptions erronées et dans le manque de compréhension de notre propre souffrance et de celle de l’autre personne. En contemplant l’impermanence, nous pourrons nous regarder ainsi que la personne qui, selon nous, est à l’origine de notre colère, avec les yeux de la compassion et alors reconnaître combien nos relations sont précieuses. Nous pratiquerons la Diligence Juste pour cultiver notre capacité de compréhension, d’amour, de joie et d’inclusivité. Ainsi, nous transformerons progressivement la colère, la violence, la peur en nous et nous aiderons les autres à faire de même
Lorsque la colère ou la haine apparaissent, il faut préparer le terrain de manière à ce que la compréhension survienne. Si nous nous arrêtons de penser, de parler et d’agir, s’ouvrira devant nous l’espace nécessaire pour que nous puissions voir et comprendre. Dès que nous sentons l’irritation monter, il faut inspirer et expirer consciemment, et engager tout notre être dans notre respiration. Puis, avec l’énergie de la Pleine Conscience, regarder profondément et voir comment la personne qui nous a mis en colère nous a peut‐être aidé dans le passé, combien elle a souffert
ou combien nous‐mêmes avons été maladroit. Cela peut nous prendre quelques minutes, ou quelques jours. Tant que nous n'avons pas compris, il vaut mieux ne rien dire à cette personne. Pratiquer la méditation marchée et la respiration consciente suffit. Lorsque nous faisons pousser un citronnier, nous voulons qu’il soit beau et vigoureux. Mais s’il ne l'est pas, nous ne le blâmons pas pour autant, nous l’observons pour comprendre pourquoi il ne pousse pas bien. Peut‐être n’avons‐nous pas pris bien soin de lui. Nous savons qu’il est étrange de blâmer un citronnier; nous le faisons pourtant avec les êtres humains qui ne grandissent pas bien. Parce que nos frères, nos soeurs et nos enfants sont des humains, nous pensons que nous devons agir de manière différente. Les êtres humains ne sont pas très différents des citronniers. Si nous prenons bien soin d’eux, ils “pousseront” correctement. Le blâme n'aide jamais. Seuls l’amour et la compréhension peuvent aider les gens à changer. Si nous prenons bien soin d’eux, nous serons récompensés par leur amabilité. Est‐ce si différent des récompenses que nous recevons de notre citronnier ?

Si j’étais né et élevé dans les mêmes conditions sociales qu’un pirate, je serais maintenant pirate. Toutes sortes de causes interdépendantes ont créé l'existence du pirate. La responsabilité ne repose pas uniquement sur lui ou sur sa famille mais elle repose aussi sur la société. Tandis que j’écris ces lignes, des centaines de bébés sont en train de naître près du Golfe de Siam. Si les hommes politiques, les éducateurs, les économistes et autres ne font rien pour l’empêcher, nombreux sont ceux qui, parmi ces bébés, seront pirates dans vingt‐cinq ans. Chacun de nous est un peu responsable de l'existence des pirates. Méditer sur les origines interdépendantes et regarder avec compassion nous aide à comprendre notre devoir et notre responsabilité envers les êtres qui souffrent. C’est grâce à cette capacité de voir que le Bodhisattva Avalokiteshvara est capable d’aimer et d’agir. Le but de la méditation, c’est de voir et d’entendre. La phrase “des graines de colère gisent dans notre conscience profonde” signifie que la colère ou la haine ne se sont pas manifestées. Cet entraînement nous conseille de faire appel à la médecine préventive. Nous pourrions penser qu’il est impossible de transformer la colère et la haine à l’état inconscient, et qu’il vaudrait mieux le faire lorsque nous sommes déjà en colère. Mais nous pouvons transformer la colère et la haine avant qu’elles n’apparaissent. Pendant la méditation assise, nous pouvons éclairer les sentiments désagréables de notre Pleine Conscience et ainsi identifier leur racine. Nous pouvons regarder directement ceux que nous préférons généralement éviter et, par ce seul regard, ils se transformeront. Lorsqu’ils jailliront alors de notre subconscient sous forme de colère, ils ne nous prendront pas par surprise. Nous pouvons aussi planter des graines d’amour, de compassion et de compréhension qui affaibliront nos graines de colère dans notre quotidien. Nous n’avons pas besoin d’attendre que la colère surgisse pour faire cela. D'ailleurs, il est beaucoup plus difficile de le faire une fois qu'elle est là. Nous pouvons nous sentir joyeux et paisibles pendant une semaine ou deux. Cela ne veut toutefois pas dire que les germes de colère ne dorment pas dans notre conscience profonde. Il se peut par exemple que nous n'ayons pas de réactions quand quelqu’un nous blesse. Mais nous pouvons nous mettre en colère contre cette personne plusieurs semaines après, pour une raison tout à fait insignifiante. J’ai entendu l’histoire d’un enfant qui avait souillé les murs de la salle de séjour avec ses excréments. Sa mère essaya de tout nettoyer et ne semblait pas du tout fâchée. Mais quelques jours plus tard, la petite fille renversa du jus d’orange sur la table et sa mère explosa. Il est évident que les germes de colère avaient été semés et réprimés lors du premier incident. Si nous sommes pleinement conscients, nous saurons prendre soin de notre colère avant qu’elle ne devienne une bombe à retardement. Si nous ne sommes pas capables de transformer notre colère alors qu’elle n'est que semence, nous pouvons encore, si elle apparaît, la transformer en suivant notre respiration. Mais si nous ne pouvons la transformer immédiatement, il vaut mieux s'éloigner et prendre refuge dans la marche méditative. La communauté du Village des Pruniers a récemment créé un Traité de Paix, un accord entre les membres d’une même famille ou d’une communauté pour savoir ce qu’il faut faire lorsqu’on est en colère.
(Cf : La Plénitude de l’instant, vivre en Pleine Conscience Éditions Dangles Saint Jean de Braye
France 1994).
“Regarder les autres êtres avec les yeux de la compassion“ est une citation du Soutra du
Lotus. Les yeux de la compassion sont aussi les yeux de la compréhension. La compassion est l’eau
fraîche qui sort de la source de la compréhension. Pratiquer le regard profond est le remède de
base contre la colère et la haine.






Nous remercions le Centre de méditation de l'Estrie d’où nous provient ces commentaires.